Le 20 février 1906 Frédéric Curie naissait à Etupes dans une maison (ironie de l'Histoire) de l'actuelle rue de la Libération. Ses parents Louis et Marie Anna sont agriculteurs.
A la date du jeudi 20 février 1941 des cahiers de prisonnier, voici ce qu'il écrit : " Aujourd'hui à 8 h du matin ou du soir (je ne me souviens plus) j'aurai 35 ans. Triste anniversaire (...) D'ici, je ne vois plus comme on vit dehors. Pour certaines choses, il est avantageux de rester dans l'ignorance. Au début de l'occupation, il fallait que tout le monde soit rentré pour 10 h ou 10 h 1/2 et tu aurais vu comme les gens rasaient les murs en courant à cette heure-là, plus aucune voiture ne circulait et on entendait les galopades sur les trottoirs. Les deux premiers jours une voiture passait avec un haut-parleur, interdisant toute sortie, même dans la journée. Pendant 48 h, tout le monde chez soi. Je n'ai vu, pendant ces jours-là, qu'un bonhomme avec un pain long dans la rue du Vieux-Colombier, je me demande d'où venait le pain. Puissions nous revoir bientôt Paris avec ses lumières. Il y a des lames qui n'ont pas fonctionné depuis longtemps. Ce sera un peu pour elle une libération de briller à nouveau. Et les tubes au néon. Revoir les Boulevards, les vrais, comme il y a deux ans. Je voudrais bien faire un tour à Lyon ou Marseille pour voir un éclairage normal".
Frédéric Curie a laissé un autre témoignage, daté cette fois du vendredi 20 février 1942 dans son "Cahier d'un exilé".
A la date de son anniversaire, il note : "18 h 45, un autobus vient de passer, j'étais debout et le regardais passer par la fenêtre du bureau, un employé lui aussi (compartiment de 1ere) près de la vitre baillait ou en donnait l'impression. J'allais en faire la remarque au moment où je me surpris la bouche ouverte en train d'enfaire autant. Il y a 36 ans, on ne savait pas encore si je serais fille ou garçon, on allait pas tarder à le savoir, à 20 h je crois. Si ...! je ne serais sans doute pas à Vitry. Toute une vie se trouve quelque fois modifiée par un incident quelconque. C'est une suite de causes et d'effets qui deviennent causes eux-mêmes, une unité qui avance à 18 h dans les couloirs du métro, qui a une volonté mais qui subit aussi les poussées de son entourage. Nul n'est complètement responsable (...) Si... la pierre ne s'était pas trouvée sous la roue de l'autobus, elle n'aurait pas été projetée, l'homme n'aurait pas eu un oeil crevé, il pourrait encore gagner sa vie, élever son fils qui pourrait être docteur ou dictateur et qui ne sera jamais qu'un terrassier. Si..."
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